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Le Guatemala sans président

Catégorie(s): Démocratie, Droits humains, Coopération volontaire, Guatemala, 2015

L’auteure, Alexandra Billet, est conseillère juridique volontaire déployée au Guatemala dans le cadre du projet «Protection des enfants, femmes et autres collectivités vulnérables» mis en œuvre par Avocats sans frontières Canada (ASFC) et le Bureau international des droits des enfants (IBCR) grâce à l'appui financier du gouvernement du Canada accordé par l'entremise d'Affaires mondiales Canada.

Le Guatemala vit présentement des moments historiques à quelques jours des élections présidentielles, législatives et municipales. Ces événements sans violence que certains observateurs internationaux qualifient de « Central American Spring » plongent toutefois le pays dans une situation d’instabilité.

Durant les dix-neuf dernières semaines, des manifestations populaires pacifistes se sont organisées de manière hebdomadaire à travers les réseaux sociaux. Le peuple s’est réuni sans violence chaque samedi devant le Palais national pour clamer son exaspération et ses revendications contre la corruption qui affecte le pays.

Le 8 mai 2015, la vice-présidente Roxana Baldetti avait démissionné de son poste suite au scandale dit de « La Línea » révélé par la Commission Internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) et le ministère public. Cet épisode de « La Línea » serait, d’après les révélations du ministère public, une vaste fraude douanière s’élevant à plusieurs millions de dollars et impliquant plusieurs hauts fonctionnaires d’État, dont Otto Pérez Molina, le président de la République du Guatemala.

Après l’audience de « première déclaration », le 26 août dernier, Roxana Baldetti a été envoyée en détention préventive par le juge pénal du « Tribunal B de Mayor Riesgo », Miguel Ángel Gálvez, considérant qu’il y avait des éléments de preuve suffisants pour mener à l’ouverture d’un procès.

Otto Pérez Molina s’était exprimé publiquement au cours de la dernière semaine pour affirmer son refus de démissionner malgré les revendications populaires généralisées. Dans une conférence de presse du 31 août dernier, il avait communiqué son intention de se soumettre au processus légal (« debido proceso ») et à la décision du Congrès.

Le 1er septembre 2015, après avoir pris connaissance des preuves fournies par le ministère public et la CICIG, le Congrès a finalement décidé de retirer l’immunité accordée au président de la République du Guatemala, une décision historique sans précédent, qui permet ainsi l’ouverture de poursuites judiciaires à son encontre.

Le 3 septembre 2015, le Président Otto Pérez Molina a remis sa démission et s’est rendu à la justice.

« L’expérience pacifiste a donné raison au peuple » (1),
Rigoberta Menchú, Prix Nobel de la paix 1992.

(1) « La experiencia pacífica ha dado la razón al pueblo », entrevue de Rigoberta Menchù avec l’agence EFE.